Mise au pas.

Son esprit n'était plus qu'une plainte. Bientôt elle craquerait sous la pression terrible, bientôt elle ne serait plus capable de ne pas lâcher cette ultime bribe d'elle-même, celle dont elle avait fait la dépositaire de son identité la plus intime.

Au début on l'avait mise au service de ces jeunes Elfes à peine dégrossis qui s'engagent dans les profondeurs de Teldrassil, particulièrement au refuge des saisons où reposent les corps de certains druides encore enfermés dans le rêve d'émeraude. Mais en toute sincérité, elle était revenue avec le sourire et la satisfaction du devoir accompli... ce qui n'avait pas plu.

Alors on lui avait interdit de porter le moindre bijou. Son collier lui avait été retiré et même ses sandales avaient été jetées au feu. On voulait lui signifier la pauvreté de sa personne par tous les moyens. Rien... elle n'était rien. Depuis des jours personne ne l'appelait plus par son nom. Elle n'avait même plus la liberté de penser. On lui avait laissé le strict minimum pour être décente. Son appartement avait été vidé. Elle n'avait plus d'existence qui ne soit collective.

Les attaques étaient incessantes. On lui avait demandé de répéter pendant de longues heures ces mantras infernaux qui la laissaient avec la tête vide et sans défense. On l'avait humiliée... réduite aux basses besognes mais là encore elle avait réussi à se préserver, isolant ses pensées de son corps meurtri, ses ongles cassés et ses genoux douloureux à force de briquer les marbres rutilants des cours intérieures du Temple. Elle aurait pu être fière du travail accompli si on n'avait pas fait tourner alors même qu'elle briquait encore les Sentinelles montées sur leurs tigres. Si bien qu'elle devait refaire et refaire encore le même travail, nettoyant les vieilles pierre de la poussière transformée en boue par la pluie qui s'abattait régulièrement.

Et puis son corps avait abandonné le combat. Son dos, ses bras, ses jambes n'étaient plus qu'une longue plainte qui la laissait presque inconsciente, plongée dans un état de faiblesse intense ou les sons bourdonnants lui paraissaient lointains. Là, dans les jardins du Temple, on lui avait demandé de répéter, répéter et répéter toujours, jusqu'à ce que sa voix s'abîme.

La lumière de la pierre de prières l'aveuglait. C'était voulu. Elle perdait la notion du temps, de l'espace... de sa propre personne.

Tout ça pour quoi ?

Elle avait terriblement peur de l'oublier.

Une douce mélopée s’élevait de la salle du Temple baignée par la Lune

La mère supérieure passa d’un pas souple et s’arrêta un instant pour observant les deux jeunes novices qui priaient d’une voix douce et mélodieuse puis , satisfaite, poursuivit sont chemin …

La plus petite se leva moins souplement qu’a son habitude … « perdu l’habitude de m’user les genoux moi » pensa t elle en ronchonnant
Sa compagne , plus jeune , le port altier interrompit sa prière et lui jeta un regard dédaigneux

« Ou as tu trouvé cette frippe ? viens tu du fin fond de Sombre Vallon pour que ta Mère ne puisse t’offrir une robe digne d’une vraie prêtresse ? » lâcha t elle pleine de morgue

ces paroles venimeuses firent chanceler légèrement leur cible ….Vraie prêtresse…les mots redonnaient dans sa tête , tourbillonnant, entrecoupées d’image surgies du passé …puis elle se reprit..La jeune noble contenait de cracher son venin
« je sais que les filles des fermes achètent parfois des robes de prêtresse n’ayant pas été autorisées à prononcer leurs vœux »
Nouveau coup de couteau dans son cœur…rabattant d’un geste machinal les broderies marquées à ses initiales.

Elle la regarda longuement , se retenant de répondre « je suis Eldianila Amara, mais on m’appelle Nedylene , tu te prétends prêtresse petite pintade alors que tu te pissera dessus quand un tauren bavant de trois mètres de haut avec une hache plus grande quoi toi fera des moulinets devant ton joli museau pour te désosser ,et que tes compagnons mourront par TA faute parce que tu ne sais rien faire d’autre que lécher le cul de ma tante, son Excellence Serenissme A’morra »
Secouant la tête , remâchant sa rancœur elle se tut gardant son sermon brutal pour elle…elle n’etait pas ici pour sa et Aelwenn avait besoin d’elle

Aussi pris t elle congé , honteuse, comme il sied à son rang, bafouillant quelque chose (.. connasse ) d’un sourire contrit

Rien n’avait changé ici …à quelque chose malheur est bon …elle connaissait bien le chemin de la Bibliothèque

La novice en robe passée glissa, féline dans les couloirs deserts. les murs se couvraient progressivement d’étagères de lourds écritoires

Elle repensa tristement à cette jeune noble qui l’avait agressée…
« laisse tomber …elle est jeune et fiere »…Elle soupira

« Et les cimetieres sont pleins de malheureux trop jeunes…et trop fiers »

L’aile de la bibliotheque etait en vue…elle relu la note d’Ael détaillant l’ouvrage , puis la brula

Rien n'avait changé. Même ici la vénalité et l'arrogance de l'argent transpiraient. Voilà ce qu'étaient devenues les Familles Nobles, un ramassis de paresseux, tout juste bons à s'empifrer et se pavaner à la dernière mode.

La silhouette encapuchonnée, vétue d'une simple cape de voyage usée par le temps et les intempéries, foula le sol du temple. Ses talons claquèrent sur le marbre astiqué, y laissant quelques boues et herbe. Le bruit des pas résonnait et le voyageur ne changea pas d'attitude, il apparaissait très clairement qu'il se souciait peu de cela. Aussitôt deux nobles, chichement vétues, s'interposèrent. Celle qui semblait la plus pédant prit aussitôt la parole: "Comment oses-tu, sale cloporte, souiller de ta présence ce lieu sacré? DEHORS!" Sur ces mots elle tapa le sol de son bâton de cérémonie.

Le voyageur reconnut cette voix nasillarde, qui un instant plus tôt avait pestée sur deux novices,modestement vétues. Il haussa les épaules et avança en passant entre les deux prêtresses d'Elune, médusées devant un tel affront.
La réaction ne se fit point attendre, se sentant humiliée par l'attitude du voyageur devant son refus d'obtempérer et de se confondre en excuses, elle fit un mouvement du poignet et attaqua de son bâton de cérémonie.
Le coup manqua sa cible, un pas rapide sur le côté avait permis d'esquiver. Aussitôt, le voyageur risposta et sa main droite vint, telles des serres, étrangler la prêtresse.

L'autre prêtresse fut un peu plus longue à réagir, ce qui laissa le temps à l'étranger d'assurer encore un peu plus sa prise et de soulever à bout de bras la prêtresse, dont les pieds finir par quitter le sol.
Un sort fut déclenché, la seconde prétresse avait fini d'achever sa prière, un sourire mauvais aux lèvres. Ce qui se passa la prit par surprise. Le sort glissa sur l'étranger comme la pluie sur sa cape, et pour empirer la situation, une forme sombre et fugace la heurta de plein fouet, la propulsant plusieurs mètres en arrière, les vêtements lacérés et inconsciente. Un tigre de monte avait fait irruption dans le temple pour protéger son Maître. Une prêtresse était hors de combat, l'autre n'allait pas tarder. Un violent coup de poing dans le thorax finit de lui couper le souffle et à son tour, elle sombra dans la froideur de l'oubli.
L'étranger laissa choir le corps inconscient au sol, ramassa le baton, objet de culte mais surtout d'arrogance pour la prêtresse inconsciente, et le brisa contre le sol. Le fracas attira, une Mère supérieure et une sentinelle.

La sentinelle resta sur ses gardes, le tigre de monte la fixant en lui montrant les crocs. La Mère supérieure incanta et un éclair percuta le félin. Un cri de rage couvrit le cri de douleur du fauve.
Un vent violent souffla à travers le temple pour venir "s'enrouler" autour du voyageur, une atmosphère de rage et de bestialité emplit aussitôt la place. Le silence et l'harmonie était brisés.
Alors s'opéra une altération. La cape du voyageur semblait rétrécir..non elle devenait trop petite. Ce dernier dans un geste de rage la jeta au sol avant que la transformation ne soit totalement achevée. Un Sélénien faisait maintenant face à la Mère supérieure et à la sentinelle. Cette dernière partit en courant, chercher des renforts àprès un regard entendu de la Mère Supérieure.

Elle prit la parole:"Etranger, toi qui viens en ce lieu plein de rage, que veux tu? Parle ou subis mon courroux!
Le Sélénien répondit dans un son guttural:" Ton courroux? Toi qui passes ton temps en ce temple entourée de personnes vénales et matérielles qui ne pensent qu' à leur gloire",de la tête il lui indiqua les deux prêtresses étendues, "alors que pendant ce temps, par centaines les notres tombent sous les coups du Fléau, je venais chercher l'aide de véritables prêtresses et protectrices du Peuple".

"Le temps est venu, cela fait des mois que je subis de lourdes défaites que les miens tombent à mes côtés sans que je puisse y changer quoique ce soit, mes blessures au coeur et à l'âme sont plus profondes et douleureuses et que les centaines que j'ai reçues dans mes chairs lors de ce dernier trimestre à combattre et à échouer contre le Fléau. Et pendant ce temps, l'insouciance et la décadence règne en ces lieux. Et toi tu oses parler de courroux?" D'un geste, le Sélénien prit un objet et le lança aux pieds de la Mère supérieure. A ce moment, une dizaine de sentinelles l'encerclèrent, armes aux poings, guettant l'ordre de la Mère supérieure.

Cette dernière ramassa l'objet, une chaine portant un médaillon ,qu'elle reconnut aussitôt. Elle s'avança vers le Sélénien, prit sa cape au sol et lui posa sur les épaules."Tu peux reprendre ta forme elfique, ma Fille, le combat a cessé, nous ne sommes pas tes ennemis, Courroux de Malorne, cependant sache que ces évènements seront rapportés à ta Mère et qu'un exil sera peut-être prononcé pour ton agression"

Le Sélénien laissa place à une elfe. La Mère supérieure se pinça les lèvres devant le spectacle. L'elfe portait les stigmates de longues et âpres batailles durement...perdues, le manque de sommeil et la tristesse émanait de cet être. Elle avait changé par rapport à ses souvenirs, sa belle chevelure avait été coupée sans soins, et ses grands yeux ambrés étaient masqués par le voile de la tristesse, même si la rage persistait. L'elfe se renmitouffla dans sa cape, et capuche baissée, se dirigea vers la direction que la novice en guenilles, réprimandée il y a quelques instants de cela, avait prise.

Elle la trouva à genoux, en train d'astiquer un marbre depuis longtemps lustré. Elle fit les quelques pas les séparant, sans se dévêtir ni de sa cape ni de sa capuche, comme pour préserver une quelconque pudeur sur son état. Elle lui tendit sa main gauche, bandée et tremblante.
"Il est grand temps maintenant...j'ai besoin de toi"

- "Ainsi c'est bien elle que tu cherches, Courroux de Malorne".

La prêtresse A'moora se tenait un peu en contrehaut, observant la scène qui devint diaphane avant de disparaitre totalement. Les quatre servantes qui l'encadraient la laissèrent s'avancer seule au devant de la druidesse. Elle descendit de la rotonde pour s'adresser sans témoins à celle qui avait tant semé de perturbation.

- "J'aurais dû m'en douter, vous avez été proches n'est-ce pas ? Crois-tu donc juste de lui faire rater son destin quand je suis allé jusqu'à refouler l'amour d'une mère pour lui prodiguer la meilleure éducation, celle qui fera d'elle un fer de lance de la nation elfique ?"

"Vois ce qu'elle est devenue, Courroux de Malorne. Vois comme elle est grande et fière. Oui, je m'en attribue une part de réussite, tout comme il t'en revient une et qu'il en revient une autre à la famille Amara. Elle a tout d'une prêtresse, elle sait s'entourer d'amis fidèles et se faire seconder. Elle est ma fille et je suis heureuse qu'elle ait trouvé cette voie."

"Tôt ou tard elle me reviendra. Elle nous reviendra. Et j'aurais alors à coeur de l'accueillir comme il se doit, comme elle le mérite désormais. Mais elle doit encore se dépouiller de cet égo qui lui brouille la vue et la fait se monter contre moi. Alors quand elle aura surmonté cette ultime épreuve, elle sera digne d'être la haute prêtresse qu'elle est destinée à devenir."

"Oui, Courroux de Malorne, tout comme ma propre soeur tu me juges. Tu me trouves indigne, mauvaise mère, pour ne pas dire tortionnaire. Je vois le résultat : ma fille est forte et digne de sa fonction. Je ne te demande pas de me comprendre. Comment assimiler en quelques phrases plusieurs millénaires de sagesse ? Je te demande juste d'envisager une hypothèse : Quand tu seras en âge d'avoir des enfants, estimeras-tu qu'ils auront dès leur 200è année la sagesse que tu auras toi-même acquise, la sagesse de ta propre mère et celle de sa mère avant elle ? Il est des choses qui ont simplement besoin de temps et d'épreuves, des choses qui doivent être vécues et surmontées. Je n'ai fais qu'activer un peu ce temps car elle est capable de le supporter... elle doit l'être. Je n'ai nulle autre prétention."

"Si tu la trouves, dis lui de me rejoindre, et je l'autoriserai à te seconder dans tes tâches les plus rudes. Dis lui aussi que son amie... est son choix. Transmets mes salutations en tes terres, Courroux de Malorne, et que la Lumière d'Elune guide nos pas."

D'un geste vague la haute prêtresse mit fin à la discussion. Ses servantes l'encadrèrent aussitôt, le visage hiératique.

-« La bibliothèque est fermée , revenez plus tard »lâcha la scribe sans lever le nez de son pupitre
-« Non Sorshael, elle est ouverte » répliqua la silhouette qui se tenait devant le pupitre ouvragé…La scribe leva le nez de ses papiers
-« mais comment osez v… » comenca t elle indignée « Eldi…Eldianila Amara, mais c’est .. »
-« Impossible ? si tu vois bien…Incongru ? ..sans doute »

Elle saisit vivement le poignet de la scribe qui se tendait vers une clochette d’argent
« Pose ca et écoute moi…détends toi je ne veux pas te faire de mal…j’ai juste besoin d’un livre »

A défaut d’etre courageuse Sorshael etait maniaque et sa conscience professionnelle et son amour des livres lui fit office de courage
« Tu veux VOLER un livre ! jamais ! JAMAIS ! »

Nedylene/Eldianilia regarda la scribe , tristement

« Sorshael…ne me fais pas faire ca…s’il te plait…nous étions amies autrefois » sa voix etait triste et lasse et elle porta la main a sa manche ou était dissimulé sa dague puis se ravisa
La scribe en avait pourtant perçu l’éclat métallique
« Tu ne ferai pas ca Eldianila…tu n’es pas ainsi malgré ce qu’on peut raconter sur toi »
Nedylene eu un pincement au cœur , assaillie par une image patinée par le temps …sa tante brisant son bâton de prêtresse ..le regard triste de sa mère mais qui ne cillait pas…elle-même qui vacillait et fut rattrapée par une novice secourable …Sorshael…oui c’etait elle

Ce geste lui avait sans doute value d’être reléguée ici dans la bibliothèque..

« Sorsha …je ne veux pas le voler..je le rendrai si c’est possible …ca n’est pas pour moi ..il servira a guérir quelqu’un »
« Hum…quel est ce livre ? » …Nedylene lui murmura le titre à l’oreille et la scribe blêmit
« Seuls les hauts pretres y ont acces tu me demande trop Eldianila » couina t elle

Nedylene inspira..elle ne voulait pas lui faire de mal mais le temps pressait..elle la regarda dans les yeux
«Sorsha …tu as un amant..de bonne famille de surcroit..il serait fâcheux que sa mère apprenne qu’il s’est épris d’une fille modeste ..donne moi ce maudit bouquin et je disparaît de ta vie avec ton secret »

La malheureuse blanchit et parcourue les rayonnages , livide , pleurant doucement et revint avec un lourd ouvrage d’ou émanait une présence malsaine..
« tiens ..mais la grande prêtresse le saura si tu l’ouvre…il est protégé….vas t en ..laisse moi »

Nedylene avait pris sur elle pour se montrer si dure et elle la pris dans ses bras avec douceur

« pardonne moi si tu peux Sorsha…. »..La scribe leva vers elle des yeux rougis….Nedylene lui murmura ..
« soit heureuse avec ton aimé mon amie »

Ce faisant elle donna une légère poussée a un encensoir qui tomba au sol…conditionnée comme elle l’etait Sorshael la scribe se hata de se baisser pour le ramasser..

Quand elle se releva elle etait seule…elle sourit essuyant ses yeux

« Prends soin de toi Eldianila »

Dans une autre aile la grande prêtresse A’moora s’éveilla en sursaut, soucieuse
Elle ressentait une impression bizarre…quelque chose clochait ..manquait

Elle apella sa servante qui l’aida à s’habiller et sortit , mal à l’aise

Nedylene lâcha un juron qui eu choqué un nain

Le livre avait glissé de ses doigts pourtant agiles..sa couverture semblait lui adresser un sourire malsain
Il etait par terre…ouvert

La prêtresse A’moora s’immobilisa puis parti d’un pas pressé vers la bibliothèque hélant deux sentinelles qui lui emboîtèrent le pas

Il veillait.

Nedylène était entrée par la grande porte et il avait pu la suivre jusqu'à ce qu'elle finisse par échapper à ses sens de chasseur.

A'moora avait fait une apparition dans une cour intérieure. Une entrevue apparemment. Pourtant il semblait qu'il y avait eu du grabuge à une autre entrée et ça avait fort bien servi Nedy qui avait pu entrer sans attirer vraiment l'attention des sentinelles intriguées par des éclats de voix et des bruits sourds.

Sa pipe était bienvenue et les feuilles séchées qui se consumaient en bouffées bleutées l'aidaient à conserver son calme. Sa part était de veiller à ce que le conservateur ne quitte pas son bureau. Il s'en acquittait.

Il avait déjà prévu de quoi occuper ce dernier. Ca n'était pas la première fois qu'il ferait des recherches pour son allié dans les arcanes de cette bibliothèque gigantesque. On disait qu'il avait fallu plusieurs navires de fort tonnage et encore une myriade de plus petits pour rapatrier à Darnassus la majeure partie des connaissances écrites des Elfes de la Nuit.

Il connaissait bien la section réservée. Il n'avait jamais pu en obtenir l'accès... mais jamais non plus de vraie raison d'en bénéficier, sauf une fois. Il l'avait eu mais jamais ce vieux corbeau de conservateur ne l'avait lâché d'une semelle. Ce soir l'individu ne bougeait pas de son bureau.

Bientôt elle fut de retour. Mais immédiatement il sentit en elle une tristesse. Il savait, elle lui avait dit. Elle avait dû user de l'argument dont elle disposait, quand bien même elle se dégoutait de le faire. Et à ses yeux elle n'en était que plus méritante encore, car une fois de plus ce n'est pas pour elle qu'elle le faisait.

Elle n'était que dévouement. Il l'aimait.

Elle sortit une petite broche qu’elle tenait sous sa robe passa sa main sur l’améthyste qui l’ornait

« espérons qu’elle sera à l’heure » marmonna t elle scrutant le couloir avec nervosité

Elle tendit l’oreille…frôlements de tissus quelques ombres s’étiraient sur les murs…des pas.
Ceux ci se rapprochait sans nul doute..et venait vers elle...Son regard tomba sur le Livre qui semblait se réjouir de ses déboires ..les runes de la couvertures formait un visage elle en etait certaine

Elle dansait d’un pied sur l’autre cherchant une solution mais n’en trouvant pas…se cacher ?ca n’etait pas elle que l’on pistait mais le livre
Une voix autoritaire et familière se fit entendre la confortant …la prêtresse A’moora..elle etait encore à quelques couloirs de la mais elle avait peut de temps

Une lueur pourpre apparu et un vortex auréolé de lueurs vertes apparu….Elle se dirigea vers lui d’un pas rapide ne doutant pas que le portail achèverait de la faire repérer..
Les voix en effet ses rapprochaient

Elle ne sut trop expliquer pourquoi elle se prit les pieds dans sa robe mais en regardant le Livre disparaître dans le portail en lui jettent un dernier regard moqueur elle put presque se représenter le visage grimaçant lui disant :
« toi tu reste la »…et lâcha un autre juron

A travers le rayonnages elle vit une femme robuste et bien que l’armure fut légère sa fonction ne fit aucun doute.
Tirant son arme d’un geste souple elle resta aux aguets un moment , faisant signe a celle qui le suivait de s’arrêter et de faire silence..elle croyait bien reconnaître derrière elle la haute silhouette de sa tante , la prêtresse A’moora
« Bah ..ca ne sera pas la première fois que je serai jetée d’ici avec pertes et fracas »soupira Nédylene et elle commença à se lever pour sortir de sa cachette quand sa main frôla son sac
à l’intérieur une petite lueur clignotait sur un objet rond entouré d’une enveloppe flexible

« j’avais complètement oublié ce truc » pensa t elle prenant l’objet entouré d’une note qu’elle déplia sans bruit gardant un œil sur la sentinelle

Dispositif magnétique radiophonique autopropulsé XZT-75 –G5 ( modèle expérimental ..NE PAS SECOUER)

Pour activer le mode automatique tirer la poignée bleue.

Piles XT-5 non fournies

Elle etait incapable de se souvenir des explications que lui avait fournies la gnome qui avait conçu cet engin et qui avais du reste un feveu fur la langue et le regarda en souriant..
« qu’ai-j’à perdre ? l’ingénieurerie gnome à son apogée pour me sortir de la »..Elle gloussa et lança l’engin derrière un autre rayonnage

Elle le regretta amèrement
« Gooood Morning Gnoméragaaaaaaaaannnnnn ! chers auditeurs Bonjour… » hurla une voix criarde
elle vit éberluer la sphère aller se plaquer contre un des murs pour retomber aussitôt et partir en quête, rebondissant, d’une autre paroi
« Attention.dysfonctionement du dispositif magnétique..surface d’accroche non appropriée »
la sphère démentielle rebondir devant les sentinelles et la prêtresse qui regardait l’engin ahuri

« le temps sur Duns Moro sera nuageux toute la journée et de plus les… » le bidule continuait de déverser sa pollution sonore tandis qu’elle passait discrètement derrière le groupe

Elle remonta rapidement les galeries pour sortir retenant ses rires a grand peine

Rael’Sorel etait au service de Dame A’morra depuis des années..malgré cela la vie au temple n’avait pas entamé ses réflexes et ramolli ses sens …

Aussi vit t elle la silhouette se faufiler derrière eux

Elle etait presque arrivée ..elle émergea près de l’imposante statue de la Déesse ..quelques fidèles et prêtres etaient la mais ne firent pas attention a elle ..la fontaine gazouillait d’un murmure reposant , après le stress vécu elle se détendit

Elle marqua un temps d’arret à la vue d’une silhouette maigre , une elfe en manteau de voyage qui dégageait une fureur animale ….ses traits lui etaient familiers..elle se mordilla la levre et continua d’avancer

Elle le vit , ou plutot la lueur d’un fourneau de pipe , en train de flaner pres de l’entrée..elle se dirigea vers lui ne remarquant pas sa tante qui emergeait de l’entrée ou elle meme etait sorti , faisant un signe discret à la sentinelle de l’entrée et echangeant quelques mots avec celle qui la suivait.

- "N'y mêlez pas vos sentiments, car les sentiments sont comme une loupe mauvaise qui ne grossit que ce qu'on a envie de voir, en écartant tant d'indices qui n'entrent pas dans son champ."

Tels étaient les propos de Jocaste, quand il était encore son élève ; Il aurait dû mieux écouter. Ou plutôt non : Ecouter... ça il l'avait fait, puisqu'il se souvenait toujours avec acuité de cette scène, de l'intonation particulière que Jocaste mettait dans ses mots pour qu'ils s'impriment au plus profond de chacun.

Nedylène s'avançait. Il la regardait. Son regard n'était pas celui de l'ami, mais au moins celui du frère de coeur qu'il n'avaient cessé d'être depuis qu'elle était venue vers lui, et qu'elle était redevenue, bon gré mal gré, après qu'ils aient été amants. Ils ne reniaient rien de cette époque. Il la considérait même avec nostalgie et avait encore plaisir à éprouver leur complicité, à la serrer dans ses bras quand il en ressentait parfois comme elle le besoin. Il arrivait même qu'ils s'embrassent. Ils n'avaient jamais cessé. Mais c'était toujours furtif, comme un coup du coeur, comme une façon de dire "c'est bien toi et c'est bien moi, je nous reconnais".

Il aurait pu identifier sa démarche entre mille, sa façon bien à elle de marcher sans bruit, souple et discrète, s'évanouissant dans la foule aussi sûrement que dans la grotte la plus obscure, furtive en diable, terriblement insaisissable. Il avait pour sa petite stature et sa chevelure toujours un peu folle le regard tendre du plus-que-frère-et-soeur qu'ils étaient l'un pour l'autre.

"Nedylene".
En la voyant approcher il prononça son nom d'emprunt. Emprunt certes mais qu'elle avait fait sien. "Nedy" était certainement plus intime. Il l'employait parfois, tout comme il lui arrivait encore de l'appeler "p'tit coeur" comme à l'époque de leurs amours. Mais en cet instant il prononçait à voix basse son nom entier, comme le mot-clé d'un charme ancien dont la magie ne saurait jamais entièrement passer.

Il avait parlé de cette époque à Aurorielle. Sa louve était fine : Elle avait compris qu'il avait un passé qui faisait partie de lui et n'avait d'ailleurs jamais tenté de l'en faire rompre. Aurorielle et CrileLoup s'étaient promis devant Elune sous l'office de Fany. Tout son corps de louve le criait et les tatouages qu'il s'était apposés s'en faisaient l'écho. Ca n'enlevait rien à ce qu'il y avait entre Nedylene et lui, bien au contraire. Ca leur permettait de se revoir forts de ce vécu par lequel ils avaient pu constater que certaines choses sont simplement impossibles.

Il l'aimait oui. Elle était pour lui une référence et le resterait probablement toujours. Elle avait le goût de ces scènes anciennes qu'on revit avec nostalgie, de ces ambiances au goût doucâtre dans lesquelles on se replonge en retournant chez ses parents une fois adulte, retrouvant ses jouets d'enfants et ses repères si naturels. Ils en étaient sortis grandis l'un et l'autre, séparés peut-être, mais aussi plus proches encore en un sens car ce qu'ils avaient vécu n'avait pas de prix.

Et il ne vit rien des manigances de la haute-prêtresse.

La sentinelle s’approchait d’un pas souple malgré sa haute stature


Nedylene qui regardait Crileloup ne lui prêta pas attention aussi sursauta t elle quand celle-ci posa une main ferme sur son épaule

« DAME amara la Haute prêtresse veut vous voir …tout de suite » , la main restant posée sur son épaule et bien que le ton fut assez neutre il était sans réplique
« Seule » dit elle regardant Crileloup avec insistance


Il regarda la sentinelle d’un air contrit et prit la parole d’un air affable

« Je suis sincèrement navré ,Sentinelle , et croyez bien que si l’affaire qui m’a fait venir querir Dame Amara sans attendre n’était pas extrêmement urgente elle accéderai sans hésiter a votre juste requête mais … »

Il cligna des yeux sans pouvoir achever , et vit la large allée de marbre qui menait a l’arbre sculpté de la banque de Darnassus …..dos au Temple..
Il était dehors !

Il inspira sollicitant sa mémoire…rien…il était juste certain de ne pas avoir été reconduit manu militari par la sentinelle … il comprit et soupira cherchant une idée

La Haute prêtresse inclina la tête vers la disciple bien inspirée qui avait écarté l »importun

Celle-ci sourit en retour , satisfaite de son contrôle mental mais ..troublée..L’esprit de cet elfe possédait une structure étrange…elle avait rapidement passé sur ses préoccupations lyriques et romantiques, très nombreuses, jugeant cela trivial et sans intérêt avec une pointe de mépris
Bien plus intéressant , le fait que de nombreuses autres « personnalités » , semblait s’inscrire en filigrame dans l’esprit de cet elfe comme si il n’était pas ..tout seul dans sa tête….elle hésitait a en parler a son instructrice de peur qu’elle se rie d’elle … mais elle nota dans un coin de sa mémoire le nom de ce fascinant futur sujet d’étude ..Crileloup

Nedylene grimpa l’escalier majestueux vers la terrasse ou était perché le vieux vautour, la sentinelle inscrivait ses pas dans les siens
« Vous avez peur que je m’envole ? »…celle-ci demeura , bien sur ,impassible

« Bonjour ma Tante ..comme vous le voyez je suis en pèlerinage » dit elle joyeusement exhibant un cierge dérobé hâtivement
Comme elle s’y attendait la Haute prêtresse A’moora n’était pas d’humeur a rire

« Trèves de balivernes ma nièce ..cet ouvrage que vous avez dérobé est rare et précieux... » dit t elle sèchement
Nedylene porta la main a sa poitrine d’un geste outré..moi ? disait sa moue offusquée
« Assez de simagrées Nedylene puisque c’est comme cela que tu te fais appeler , tu as offensé la Déesse une fois de plus ..la pauvre n’en est plus a ca près » soupira telle dardant sur Nedylene un regard perçant ,
Nedylene la regarda intriguée
« Serait ce une pointe d’humour ma tante ?! méfiez vous ! au train ou vont les choses vous finirez presque par me dire bonjour a vous relâcher ainsi » lâcha t elle pétillante puis jugea utile sous son regard glacial de ne plus la provoquer davantage .

« Ce livre ne doit pas tomber entre de mauvaises mains Nedylene » poursuivit la Haute prêtresse d’un ton las mais solennel .

« Ma tante je suis navrée , je n’ai rien de tel sur moi comme vous le voyez , je ne peux pas vous aider »
Un elfe élancé s’approcha de sa tante, les mains glissées dans ses manches ..
Nedylene l’observa ..ses lèvres surtout
« laissez la partir Dame A’moora ….la suivre …mener au livre …aviserons … »

Sa tante hocha la tête tandis que le visiteur s’éclipsait , et demeura pensive…Elle soupira

« A votre guise ma nièce , mais vous commettez la une grave erreur »elle fit signe a une prêtresse en contrebas, qui s’était avancée.
« raccompagnez cette personne au village portuaire de Ruth’Eran et veillez a ce qu’elle trouve son chemin jusqu’au navire pour Kalimdor »

La prêtresse et l’indésirable sortirent..la pretresse qui marchait devant souriait avec jubilation ..Nedylene ne le vit pas et ne sut encore moins pourquoi …

Cela faisait si longtemps …

Oh non Sordelia n’avait rien oublié , rien pardonné non plus …
Il s’etait écoulé bien des décades depuis l’assassinat de son frère par cette traînée qui marchait devant elle sur le ponton du village portuaire de Ruth’erann.

Un accident avait elle prétendu …Fort bien cela serait aussi son cas par un juste retour des choses…Sordelia sourit a cette pensée et ce sourire carnassier n’echappa pas a cette Nedylene qui semblait ce sentir mal a l’aise … mieux encore se réjouit Sordelia ; elle avait peur.

Certes cette traînée avait été bannie pour l’assassinat de son frère et avait perdu jusqu'à son nom en prenant celui de Nedylene …Un coin de l’esprit de la prêtresse semblait vouloir rejeter cette vengeance qui ne rimait a rien…elle repoussa sans trop de mal les soubresauts de sa conscience…Sordelia etait amère depuis bien trop longtemps pour reculer.

Un oiseau marin caqueta sur une des piles du pont et prit son envol …Le navire apparu a l’horizon.
Les deux elfes s’arrêtèrent a quelques mètres du bord de l’embarcadère .
Il apparu comment a la prêtresse commet accomplir sa vengeance. Elle se caressa le menton ,contemplant pensivement les flots , Nedylene , puis le navire qui approchait.

Il était peut-être barde, mais il n'en avait pas moins suivi avec assiduité la voie plus rémunératrice de la chasse, bien utile quand l'heure n'est pas au lyrisme romantique mais aux mugissements de l'estomac vide.

Quand il vit Nedylene sortir, précedée d'une prêtresse à l'expression carnassière, il n'eut que le temps de se fondre dans l'environnement. Elles passèrent tout à côté de lui, leur attention détournée par le lion des Tarides qui fut pris fort à propos d'un baillement confinant au rugissement.

La prêtresse n'y jeta qu'un oeil. Nedy chercha rapidement autour mais sans pousser l'investigation pour ne pas éveiller les soupçons. L'air tendu qu'elle arrbhorait en se dirigeant vers le ponton lui signifia bien assez clairement qu'elle ne pensait pas tout le barde à proximité.

Tapi dans les ombres d'un pilier, Echeyakee s'avançait, l'esprit dirigé par celui de son maître. Il se figea un instant quand un oiseau prit son envol en caquetant, alerté par son instinct de fuite. Mais rien. Ni l'une ni l'autre des Elfettes ne se doutait de quoi que ce soit et les Sentinelles semblaient n'avoir rien remarqué.

Les sens en alerte, Echeyakee attendait. L'atmosphère était étrangement tendue. Puis tout se précipita ! Le barde reconnut les gestes que la prêtresse avait déjà effectués devant lui avant qu'il ne se retrouve éjecté du Temple... Mais pourquoi faire ? Le bateau approchait, plus que quelques brasses. Nedy avança d'un pas d'automate vers le bord du quai, près, très près... bien trop près !!

Le barde sortit son arc. Hélas la manoeuvre était bien plus lente que le sortilège et c'est avec effroi qu'il vit Nedylène effectuer un dernier pas à l'instant où le bateau accostait. La flèche jaillit en direction de la prêtresse et lui arracha son symbole qui fut précipité à la mer.

Nedylene avait disparu.

Comme un fou il se précipita sur le ponton. La prêtresse, désorientée, monta dans le bateau, probablement en quête d'une cachette. Il ne put lire son expression avant que sa silhouette ne s'engouffre dans l'entrepont. Plus de trace de Nedylene... Et Echeyakee était penché sur l'eau sombre entre la coque et le quai. Nul témoin. L'équipage, tout à la manoeuvre, ne se souciait guère de ce qui pouvait se passer à terre. Jetant sa cape et ses épaulières le barde s'approcha précipitamment... pour découvrir les griffes d'Echeyakee plantée profondément dans le bras de sa soeur de coeur.

Elle était suspendue entre le quai et le bateau, inconsciente. Pourvu que...

D'un mot il intima aux Sentinelles enfin alertées l'ordre de repousser la coque. Elles s'arcboutèrent aussitôt pour gagner un peu d'espace, aidées par les marins et les lamasseurs qui avaient pris conscience qu'un accident venait de se produire. Le plus délicatement possible il la sortit de là et la porta dans ses bras, dégoulinante d'eau de mer. L'une des Sentinelles se proposa d'aller quérir un guérisseur mais il la rassura en l'assurant qu'il se rendait chez un ami druide très efficace. Rassurées par ses mots choisis, les deux Sentinelles s'affairèrent donc à remettre bien vite de l'ordre et le maître d'équipage rappela ses hommes aux postes de manoeuvre.

Il emmena le corps inerte de sa soeur jusqu'à la maison la plus proche, celle où il y avait ces spécialistes animaliers, de vieilles connaissances qui l'avaient guidé dans la découverte de la vérité sur les Silithides. Avec douceur il l'allongea, dégageant les nombreux ouvrages qui encombraient la couche, et usa de sa science de soigneur profane, la déshabillant avec précaution. Elle gémissait parfois, presque imperceptiblement, et avait encore quelques réflexes de défense qui le rassurèrent. Elle souffrait d'une fracture, de profondes déchirures provoquées par les griffes salvatrices d'Echeyakee mais aussi de multiples contusions sur tout le corps, dont une énorme bosse sur le front. Le choc qui l'avait occasionnée était probablement à l'origine de son inconscience du début même si maintenant, ayant perdu beaucoup de sang, elle n'était sans doute que très affaiblie. Il nota aussi la non-cicatrice, toujours présente. Une fois soigneusement pansée, bandée et attelée, il la frictionna un temps pour la réchauffer tout en l'enroulant dans une couverture.

Le pauvre Eche ne semblait pas fier mais le barde eut à coeur de le féliciter pour ses réflexes qui venaient probablement de sauver la vie de sa soeur. Il la veilla une bonne partie de la nuit. Il ne pouvait pas faire appel à Aénor qui avait encore trop de liens avec Darnassus et dont il ne connaissait pas les positions vis-à-vis du Grand Temple. Ils ne se connaissaient pas assez. Il appelait donc Aelwenn, Mahlyce ou Yaëlle sans relâche sur le cristal, Silwenne ou Démogorgone sur le Fil Enchanté, et invoquait sa Nilianée par l'esprit. La jeune Elfette répondit la première, ensommeillée.

- "Ael, viens vite, j'ai besoin de toi !"
- "Qu'est-ce qui se passe ?" répondit la prêtresse rebelle avec un ton endormi.
- "Nedy est blessée, elle a besoin de soins."
- "Haan ! Ca va aller ? Tu t'en sors ?"
- "Auriez-vous encore brisé un coeur CrileLoup ?" énonça la voix perfide de Lazara avec ses airs de fausse innocence. Il résolut de l'ignorer, répondant à Aelwenn.
- "Oui mais j'ai peur qu'elle s'affaiblisse si rien n'est fait rapidement. Elle a perdu beaucoup de sang."
- "Vous êtes où le Loup ?" C'était la voix de Dylinrae qu'Aelwenn venait probablement d'éveiller.
- "A Rut'Theran, dernière demeure face au ponton, ce sont des amis."
- "Oui, je vois, je les connais aussi. On s'habille et on arrive. Tu as prévenu Eli ?"

Il mit un temps à répondre. Elistraë était l'épouse de Nedy, et quand bien même Nedy n'était pas heureuse, il se devait de respecter ce lien qu'elle respectait elle-même quoi qu'il lui en coûte.

- "Pas sûr que Nedy ait envie de lui parler de tout ça. Tu sais où la joindre ?"

C'est Aelwenn qui répondit pour les Elfettes :
- "Non mais Dyli saura peut-être, elle a gardé des liens avec la soeur d'Eli. Je vois avec elle tout de suite, on s'en occupe."

Un temps passa. La prêtresse discutait probablement avec son élue. Elle reprit : "Le Loup ? Dyli propose qu'on laisse un message suffisamment vague pour que Nedy puisse broder."
- "Parfait. Merci à toutes les deux, on vous attend."
- "On arrive, tenez bon" répondit Dylinrae avec un ton d'autorité naturelle qui ne souffrait pas la discussion.

On entendit un "Bah" lointain.

Il s'installa le plus confortablement possible au chevet de son ancienne amante. Son inconscience l'inquiétait. Glissant une main sous le drap, il effleura les contours de la non-plaie, ressentant la peau bien trop fraîche. Ca aussi il faudrait bien un jour le prendre en main. Elle appréciait cette marque de tendresse autrefois. Il posa sa main et ne la bougea plus pendant de longs instants, comme s'il pouvait lui communiquer un peu de chaleur et la réanimer de cette façon. Puis, renonçant à ce geste intime, il glissa ses doigts dans les siens, et se pencha à son oreille pour lui murmurer des mots qu'elle seule pouvait entendre. La main semblait vouloir se refermer sur ses doigts. Il eut un sourire tendre pour celle qui émergeait doucement à une conscience qui serait probablement douloureuse malgré l'infusion de doulourante qu'il lui avait fait ingérer.

Dylinrae s'était immédiatement assombrie. Aelwenn le regardait, tentant de capter son regard pour lui dire combien elle partageait son inquiétude. S'habillant à la hâte en prenant à peine le temps d'allumer une bougie, elles se précipitèrent bientôt dans les passerelles pour éveiller le maître des griffons assoupi.

Le vol fut silencieux. Sans un mot la jeune prêtresse resserra encore les bras de son aimée autour d'elle et posa sa tête au creux de son épaule. Il n'était pas besoin de mots pour savoir ce qu'éprouvait son Elue et combien elle souffrait de savoir sa soeur plongée dans des ennuis à répétition.

- "C'est ma faute Dyli..."
- "Ne dis pas de bêtises ma chérie."
- "Si, je te promets, c'est pour moi qu'elle a pris des risques, pour permettre à une amie de soigner une maladie qui la rongeait."
- "Arrête de culpabiliser. Nedy est une grande fille. Elle nous dira ce qui s'est passé."

Se tournant pour atteindre l'oreille de Dylinrae et couvrir le vent du puissant vol qui les amènerait directement à Rut'Theran, elle orienta délicatement le visage aimé pour lui murmurer encore quelques mots de réconfort. La guerrière y répondit par une étreinte un peu plus étroite, les yeux un peu brillants.

- "C'est une idée." répondit-elle enfin.
- "Je saurais bientôt si c'est nécessaire" reprit la prêtresse. "Avec un peu de chances ça sera plus de peur que de mal. Mais s'il le faut Scylla ne refusera pas de l'héberger j'en suis sûre."
- "Ne t'emballe pas trop ma chérie, Tu sais que Nedy est très indépendante."

De fait, rien n'était moins sûr que l'acceptation de Nedylène pour qu'elle soit - si besoin était - "mise au vert" à Havrenuit, loin de l'influence du Temple.

La voix de la jeune prêtresse s'éleva encore, un peu plus tard, portée par l'éther des cristaux : "On approche. N'y a-t-il que Dyli et moi qui soyons au courant ?"

"Non", aussitôt elle se maudit d'avoir répondu, mais d'entendre cette voix depuis si longtemps sourde, lui avait fait baisser sa garde.